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Centre d'Information sur les Institutions Européennes

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Centre d'Information sur les Institutions Européennes (CIIE)

1950 : la Déclaration Schuman… une grande stratégie à petits pas.

« L’Europe n’a pas été faite, nous avons eu la guerre. L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une construction d’ensemble. Elle se fera par des réalisations concrètes créant d’abord une solidarité de fait ».

Ces phrases prononcées par le Ministre des Affaires étrangères français, Robert Schuman, en 1950, n’ont finalement rien perdu de leur véracité. L’Europe s’est construite – et se construit toujours aujourd’hui – selon la méthode des petits pas, par des réalisations concrètes touchant le quotidien de 446 millions de citoyens européens les liant tous les jours un peu plus dans un destin commun, basé sur la paix entre les peuples.

La Déclaration Schuman ne s’est – elle non plus – pas faite d’un seul coup : pas moins de 9 projets auront vu le jour entre le 17 avril et le 6 mai 1950 avant le discours officiel prononcé par Robert Schuman dans le Salon de l’Horloge le 9 mai. A vrai dire, les citations cultes de Schuman ne figuraient même pas dans la toute première mouture du projet présentée le 17 avril 1950 et – peut-être plus étonnant encore – Robert Schuman n’était même pas directement destinataire de ces propositions de projets au départ !! Elaboré courant avril 1950 par Jean Monnet, alors commissaire général au plan, et ses proches collaborateurs, le projet ne sera en effet soumis à Robert Schuman qu’à la fin du mois d’avril 1950.

Selon la méthode des petits pas, le contenu du projet de Monnet va effectivement devoir s’adapter à la réalité du terrain et aux possibilités économiques et politico-diplomatiques du moment : d’une production franco-allemande d’acier et de charbon placée « sous une Autorité internationale » (premier projet du 17 avril 1950), la sixième mouture du 28 avril 1950 fera finalement état d’une même production placée « sous une Haute Autorité commune, dans une organisation ouverte à la participation des autres pays d’Europe », formule définitive utilisée dans le discours du 9 mai. L’affirmation plutôt tranchante du premier projet – « L’unification des systèmes économiques exige le transfert pour des produits ou des secteurs essentiels de la souveraineté des Etats à des organisations internationales » – quant à elle n’existera déjà plus dans la deuxième mouture du projet tandis que la phrase – également devenue culte – affirmant que grâce à la solidarité de production instaurée par ce projet « toute guerre entre la France et l’Allemagne devient non seulement impensable, mais matérielle impossible » ne fera son apparition concrète que dans la cinquième version du projet datant du 27 avril 1950. L’Europe ne se fera pas d’un coup…

Persuadé par la nécessité de « changer le cours des événements » mais aussi « l’esprit des hommes », Jean Monnet fera part dans une longue note envoyée à Robert Schuman le 1er mai 1950 du besoin d’une « action profonde, réelle, immédiate et dramatique qui change les choses et fasse entrer dans la réalité les espoirs auxquels les peuples sont sur le point de ne plus croire » car selon lui « les peuples d’Europe n’entendent que des paroles ». Et pour lui surtout, il est indispensable « que l’Europe apporte une contribution dynamique, qu’elle se montre à elle-même et à l’opinion américaine, qu’elle croie en son propre avenir, qu’elle crée une Europe, qu’elle la crée car elle n’a jamais existé ». La France a toute sa place dans cette construction nouvelle et – selon Monnet – surtout tout à y gagner !!

Convaincu par l’idée de Jean Monnet, Robert Schuman deviendra le porteur du projet et exposera publiquement la méthode le 9 mai 1950, devenu depuis la « Journée de l’Europe ». Tandis que l’Ambassade britannique à Paris fera part des premières réticences du Royaume-Uni à l’égard du Plan Schuman le 26 mai, confirmé par un communiqué britannique en date du 3 juin 1950 déclinant définitivement l’initiative française, les gouvernements français, allemand, belge, italien, luxembourgeois et néerlandais feront eux – le même jour – part de leur impatience par rapport à l’ouverture des négociations intergouvernementales pour la mise en oeuvre du Plan. Celles-ci seront lancées par Robert Schuman le 20 juin 1950 dans le Salon de l’Horloge du Quai d’Orsay à Paris.

Et pour celles et ceux qui ne le savaient pas déjà : c’est souvent la photo de ce même événement du 20 juin qui sera utilisée pour « illustrer » le moment très solennel du discours Schuman le 9 mai 1950 qu’aucun photographe n’avait finalement pu immortaliser, faute de présence de la presse et de la télévision ce jour-là !!

Sources : CVCE (Centre Virtuel de la Connaissance sur l’Europe, Luxembourg)

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